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Ce courtage avait été, parfois, d’autant plus actif et d’autant mieux récompensé par les maîtres de notre opinion ou de notre gouvernement que ces livres, théories ou imaginations d’outre-Rhin attaquaient plus directement notre renommée, nos qualités et nos œuvres nationales. La France de 1900 était étrangement renseignée sur la valeur respective de ses propres savants, présents et passés, et des savants germaniques. Dans tous les domaines de la science, il en était ainsi ; mais, dans le domaine de la philologie, le phénomène avait atteint son apogée : plus un philologue allemand affectait d’ignorer ou de mépriser le travail des Français, et plus il avait la chance de passer en France pour le plus récent des génies, le plus « au courant » des chercheurs ; un Français, par contre, n’était estimé chez nous que suivant la cote que voulaient bien lui donner les gens d’outre-Rhin.

Le germanisme agressif de certains maîtres avait eu pour contre-partie l’exaspération ou la révolte du nationalisme parmi les élèves... Il faudrait que la France d’après-guerre conservât, en ces matières comme en toutes les autres, quelques désirs et quelques habitudes d’union sacrée, pour le service de la nation et pour notre maintien en ce degré de gloire où nous a relevés l’héroïsme de nos défenses improvisées. Nous ne serons définitivement assurés contre l’Allemagne que le jour où nous aurons contre elle toutes les armes qu’elle a tournées contre nous, et quelques autres : la « littérature » a toujours été et doit toujours rester l’une des plus glorieuses traditions de la France ; mais jadis, l’érudition en fut une autre, et nous devons reconquérir cette gloire aussi, Gallico nomini, tot aliis decoribus conspicuo, hanc quoque gloriam impense redditam laetabatur, nous dit Fr.-Aug. Wolf lui-même.

Au fait, avons-nous perdu cette capacité ? n’en avons-