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logique la plus formelle, comme à la morale la plus vétilleuse, et, rejetant sur l’infidélité des rhapsodes ou des copistes toute faute apparente de raisonnement ou de rédaction, on proposa de corriger le texte.

Mais dans leurs interminables catalogues de louanges à l’adresse du Poète, les Anciens trop souvent oubliaient le caractère essentiel de ce langage homérique : c’est qu’orienté vers une clarté spéciale, il s’adressait à l’oreille d’abord et non pas aux yeux.

Nous avons déjà vu un exemple des erreurs que l’oubli du geste primitif faisait naître dans les esprits des générations plus récentes : faute de voir l’aède montrant la fuite des deux aigles dans le ciel d’Ithaque, on condamnait un vers des plus authentiques et des plus clairement expressifs. Chaque épisode de l’Odyssée présenterait quelque vers de même sorte où les Anciens et les Modernes ont bronché devant telle expression du langage parlé, qui devenait ambiguë dans le texte écrit.

Notre langage actuel use des pronoms sans toujours prendre le soin de leur appliquer les règles de la grammaire la plus élémentaire, et nos écrivains les plus soigneux en usent pareillement quand ils veulent reproduire le parler familier. On lit dans Le Blanc et le Noir de Voltaire :