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des porchers ». En cette heureuse porcherie, où les manières et l’esprit sont un charme, telle épithète louangeuse, telle description de sacrifice ou de naufrage ont une pointe de parodie, qui suppose une connaissance familière aussi bien des beautés de l’épos que du parler et des mœurs de la cour. Ce gardien de cochons est le fils d’un roi, le nourrisson d’une savante et habile étrangère, l’ancien élève d’une reine, l’ancien camarade d’une princesse, le commensal ordinaire, le « vieux frère » de son prince. Seul, le voisinage des chiens féroces et des pourceaux lui donne parfois quelques reflets de rudesse : s’il gardait des moutons, sa bergerie eût ravi d’aise nos Deshoulières ou nos Marie-Antoinette.

Les grammairiens, rhéteurs et commentateurs de l’antiquité posaient la clarté comme condition première de tout art littéraire. Homère, étant le plus grand de tous les écrivains, était donc aussi le plus clair ; son langage remplissait, au plus haut degré, les deux conditions de la clarté parfaite : netteté dans l’expression et ordonnance dans la composition. Les Hellènes pensaient, en effet, qu’au service de l’idée, les phrases doivent se présenter comme une armée