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naient sous ce chef toutes les qualités civiles et courtoises, qui font la culture et la sagesse, le goût, l’élégance et la finesse, le mouvement et la variété, l’aisance et le sourire, la richesse et le luxe de la société urbaine, par opposition à l’ignorance, à la lourdeur, à la rudesse, à la grossièreté, à la pauvreté, au ridicule et à la monotonie de la vie campagnarde, — à la rusticité. Car les Anciens n’ont jamais connu dans le Poète cette naïveté de la parole et cette simplicité de l’esprit, cette énergie enchaînée ou déchaînée de l’âme que, depuis cent cinquante ans, on veut nous faire admirer en ses vers.

Nous devons oublier Ossian et Shakespeare, aussi bien que Voltaire et Fénelon, nos théories romantiques sur la poésie comme nos théories classiques sur le style, si nous voulons goûter Homère comme on le goûtait au temps de Socrate. Sur ce point, les Anciens me semblent avoir pleinement raison : le Poète est, avant tout, un « citadin ». Les épisodes les plus « champêtres » de l’Odyssée ne sentent pas plus le village ou la ferme que l’exclamation virgilienne :


O fortunatos nimium sua si bona norint
agricolas !

C’est une « partie de campagne » qu’Ulysse et Télémaque font chez Eumée, « le commandeur