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ou en des épisodes différents la robustesse d’un Corneille, l’aisance d’un Racine, la facilité d’un Regnard et parfois, — pour dire toute ma pensée, — les négligences et la prolixité d’un Crébillon ou d’un Voltaire ?… quand encore les ajoutés d’un interpolateur ne viennent pas nous rappeler que notre tragédie finissante eut ses La Harpe et ses Ponsard.

Nos poètes tragiques et comiques des xviie et xviiie siècles ont accaparé, si l’on peut dire, notre poésie et en ont adapté la langue, la versification et le rhythme aux besoins et commodités de leur théâtre. Les poètes épiques de la vieille Grèce avaient fait de même : ils avaient tiré des parlers de leurs peuples une langue de récitation et ils avaient assoupli leur grand vers hexamètre à toutes leurs commodités. Le meilleur connaisseur en son temps des idiomes classiques, M. Bréal, écrivait en février 1903, au sujet du style homérique :

Pour expliquer cette merveille du genre narratif, ce n’est pas assez de supposer un rare génie poétique : on est obligé, en outre, d’admettre l’existence d’une forme depuis longtemps assouplie. Il faut, à la fois, le poète et la tradition. Au poète, sont dus la grandeur du cadre, la vérité des caractères, l’intérêt de l’action, l’harmonie de l’ensemble ; à la tradition, sont dus la mesure des vers, l’abondance du vocabulaire, la richesse des formes grammaticales, l’habitude des