Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/116

Cette page a été validée par deux contributeurs.

suelles autant qu’intellectuelles, une joie de l’œil ou de l’oreille autant que de l’esprit, et c’est aux oreilles les plus sensibles que les Poésies avaient eu à plaire.

Les Anciens saluaient dans Homère le plus grand de leurs poètes, mais aussi de leurs artistes de la voix : il était le chef du chœur oratoire, le modèle, le maître de toute rhétorique. Mais, source de « belles paroles », la rhétorique des Hellènes était la science moins de la composition que de la diction, l’art de l’élocution plus que de la pensée ou du style : elle apprenait à jouer de la voix, comme le maître de musique à jouer de la flûte ou de la lyre ; elle en découvrait et détaillait toutes les ressources et toutes les combinaisons. Homère était le plus habile de ces musiciens.

Le « beau parler », la calliphonie, pour les Anciens, n’était pas seulement le choix des mots, la cadence et la variété des rhythmes, l’harmonie et la fluidité continue du texte, bref, cet ensemble de qualités que peuvent percevoir les contemporains et compatriotes d’un Fénelon ou d’un Renan, d’un Racine ou d’un Musset, mais que souvent les générations suivantes n’admirent que de confiance et qui, presque toujours, restent imperceptibles à l’oreille des étrangers : le « beau parler » des