Page:Béranger - Chansons anciennes et posthumes.djvu/537

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



Honte et malheur à qui t’outrage,
Vierge, sœur des plus grands héros !
Que le ciel châtie en notre âge
Les Anglais, tes lâches bourreaux !
De leur orgueil ils vont descendre,
Et le Dieu dont la voix t’arma
Pour leurs fronts a gardé la cendre
Du bûcher qui te consuma.

Alors, oubliant qui l’écoute,
Il s’écrie : — Anglais inhumains,
Comme elle, ici, bientôt sans doute,
Je sortirai mort de vos mains.
Mais, pour braver vos sentinelles,
Pour fuir vos brutales clameurs,
Jeanne au bûcher trouva des ailes,
Et moi, depuis cinq ans je meurs !

L’enfant, à ces mots, fond en larmes ;
Le vieux soldat s’en attendrit.
— Près de nos geôliers sous les armes,
Vois ton père qui te sourit.
Cours le chercher ; ma force expire ;
Cours : c’est son bras qu’ici j’attends.
Hélas ! sans me voir lui sourire,
Mon fils pleurera bien longtemps.