Page:Aventures merveilleuses de Huon de Bordeaux.djvu/69

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

glissé ; elle coupe un des pans du haubert, elle enlève à Huon un morceau de la hanche et de la jambe, tranche l’éperon par derrière et s’enfonce d’un grand pied en terre. Huon chancelle, il tombe sur ses genoux, il perd presque connaissance. Un écuyer s’élance dans la chapelle où l’abbé était prosterné devant l’autel :

— Sire abbé, dit-il, vous pouvez bien prier pour Huon : il est près de sa fin.

L’abbé de Cluny se relève, il s’écrie à voix haute :

— Dieu qui n’as jamais menti, si j’ai fait dans ma vie chose qui te plaise, s’il est vrai, Seigneur, que depuis le jour où je suis entré en religion, il y a soixante ans aujourd’hui, je n’ai manqué à aucun de mes vœux, tout le bien que j’ai fait depuis ma naissance, et tous mes jeûnes et tous mes cilices, Père, j’en demande aujourd’hui la récompense. J’abandonne, s’il le faut, ma part de paradis, et que tout serve au salut de cet enfant !