Page:Avenel - Chansons et chansonniers -1890.djvu/218

Cette page n’a pas encore été corrigée

Je deviens exigeant sans doute,
Mais l’amour rend audacieux :
Je voudrais tarir goutte à goutte,
La coupe où s’enivraient les Dieux.


Cette charmante chanson montre combien le talent de sou auteur est souple et multiple ; elle prouve aussi qu’il ne s’est pas toujours laissé inspirer par la muse godailleuse et avinée. Charles Colmance était devenu membre titulaire de la Lice chansonnière en Tannée 1844. Il y a laissé d’excellents souvenirs.

Les chansonniers qui alors contrebalançaient son immense popularité, étaient : Gustave Leroy et Charles Gille. Ils formaient un triumvirat qui avait toutes les sympathies de la population ouvrière. Leurs noms étaient connus et appréciés à leur juste valeur dans tous les ateliers des faubourgs et de la banlieue.

Colmance aimait la vie ouvrière avec ses vertus et ses défauts, ses excentricités et ses débauches. Il aimait à fréquenter rétablissement de ce cher ami Savart, vigneron de la rue Conrad à Charonne . Ah ! qu’il était heureux en ce temps-là, où il avait la gaieté et la santé, de pouvoir aller avec quelques camarades se ballader aux environs de Paris ! à Bagnolet, à Sainl-Ouen ou à Argenteuil, manger une gibelotte de lapin ! Dans ces agapes fraternelles, on était quelquefois à court d’argent, mais jamais d’esprit. L’esprit sel-vait d’assaisonnement aux plats et donnait un fumet particulier et de bon aloi au petit bleu ou à la piquette aigrelette du cru. On trinquait, on riait, et l’on revenait à Paris le soir, casquette. .. c’était le bonheur.