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LA VIE RURALE.


Il est petit, mais fort. En vigoureux sillons,
Soixante ans sont inscrits sur sa mâle figure ;
Sur chacun de ses bras il montre une blessure,
S’il n’y montre plus de galons.

Il a pour adjudant un chien de bonne race,
À veiller, à combattre habilement dressé,
Et qui, vienne le loup de faim tout hérissé,
Tient tête à l’ennemi vorace.

Au premier grognement de cet aimable chien :
« Je te comprends, dit l’homme ; oui, c’est le loup qui rôde ! »
Et le voilà courant à la bête en maraude,
Comme jadis à l’Autrichien.

Pourtant cet homme est doux. À la mère empressée
II amène l’agneau qui pleure de la voix.
Comme le bon Pasteur, on l’a vu mainte fois
Rapporter la brebis blessée.

Lui qui fut raide et brusque alors qu’il le fallait,
Il parle sans rudesse au troupeau qu’il fait paître ;
Ses doigts forts et noueux, jadis noirs de salpêtre,
Maintenant sont blanchis de lait.