Page:Autran - Œuvres complètes, t2, 1875.djvu/142

Cette page a été validée par deux contributeurs.
131
AU PUITS DE MA FERME.

Tu vois aussi venir, comme une caravane,
Les hommes de labour, soit maîtres, soit valets ;
Ils conduisent vers toi leurs chevaux, leurs mulets ;
Vers toi les bruns pasteurs de brebis et de chèvres
Amènent leur bétail ; et tous, la soif aux lèvres,
De l’aube au soir, pressés dans la poudreuse cour,
S’approchent de ton onde et boivent à leur tour.

Et toi, puits des aïeux, du cristal que tu verses,
Heureux, tu satisfais ces mille soifs diverses. —
Comme un de ces grands cœurs qui, pleins de leur trésor,
Se donnèrent toujours et se donnent encor.
Tu livres sans mesure à quiconque s’approche
Ta belle eau, si glacée au sortir de la roche,
Ta belle eau qui nous vient, par un secret canal,
De je ne sais quelle Alpe au sommet virginal !

Oh ! sois toujours ainsi, fontaine hospitalière !
Vieux puits, dont le service a fait luire la pierre !
De nous, de nos voisins, sois l’abreuvoir commun :
Sois le flot qui jaillit pour tous et pour chacun :
Reste à jamais semblable au puits des patriarches,
Où venaient les pasteurs après vingt jours de marches ;