Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/603

Cette page n’a pas encore été corrigée

TRENTE-SEPTIÈME TRAITÉ. SUR LES SEPT DEMANDES DU NOTRE PÈRE.

ANALYSE. —1. Dans les Écritures, nous trouvons cinq fois le nombre sept : que désigne-t-il ? —2. Il y a sept vices principaux. —3. Sept demandes opposées à ces sept vices, et, d’accord avec elles, sept dons du Saint-Esprit et sept béatitudes. —4. La première demande est contre l’orgueil. —5. La seconde contre l’envie. —6. La troisième contre la colère. —7. La quatrième contre la paresse. —8. La cinquième contre l’avarice. —9. La sixième contre la gourmandise. —10. La septième contre la luxure.
1. Mon frère, je trouve cinq fois le nombre sept dans la sainte Écriture. Suivant tes désirs ; et autant que cela me sera possible, je veux en énumérer le détail, afin que tu sois à même d’en distinguer les différentes parties ; puis je reprendrai chaque chose l’une après l’autre et t’aiderai,.par mes explications, à bien saisir la concordance qui se trouve entre elles. Il est d’abord question des sept vices :1° de l’orgueil ; 2° de l’envie ; 3° de la colère ; 4° de l’ennui, ou, en d’autres termes, de la paresse ; 5° de l’avarice ; 6° de la gourmandise ; 7° de la luxure. À ces vices sont, en second lieu, opposées les sept demandes que nous lisons dans la prière du Seigneur :1° Celle par laquelle nous adressons à Dieu cette supplique : « Que votre nom soit sanctifié » ; 2° celle où nous lui disons : « Que votre règne arrive[1] » ; et ainsi de suite. En troisième lieu viennent les sept dons du Saint-Esprit :1° l’esprit de crainte ; 2° l’esprit de piété, et le reste. Quatrièmement, nous lisons les noms des sept vertus :1° la pauvreté d’esprit, c’est-à-dire l’humilité ; 2° la mansuétude ou la bonté ; 3° la componction ou la douleur ; 4° la soif de la justice ou le désir du bien ; 5° la miséricorde ; 6° la pureté du cœur ; 7° la paix. Enfin, et en cinquième lieu, se présentent les sept béatitudes: 1° le royaume des cieux ; 2° la possession de la terre ; 3° la consolation ; 4° le rassasiement en fait de justice ; 5° la miséricorde ; 6° la vue de Dieu ; 7° l’adoption accordée par lui. Distingue et comprends bien ceci : les sept vices sont les maladies de l’âme ; l’homme est le malade, Dieu le médecin, les dons du Saint-Esprit le remède, les vertus la santé, les béatitudes la joie que l’on goûte au sein du bonheur.
2. Il y a donc sept vices principaux, qui sont comme autant de sources d’où sortent tous les autres ; les fleuves de Babylone y puisent leurs eaux, et vont ensuite conduire et répandre sur toute la terre un déluge d’iniquités. Aussi le Psalmiste a-t-il dit : « Près des fleuves de Babylone », etc. Parlons donc de ces vices qui portent de tous côtés leurs ravages, qui détruisent totalement notre innocence naturelle et produisent, en même temps, le germe de tous nos maux. Ils sont au nombre de sept : les trois premiers dépouillent l’homme de tout ce qu’il a ; le quatrième lui donne le fouet ; une fois flagellé, l’homme est chassé par le cinquième, puis séduit par le sixième, et enfin, le septième le réduit en servitude. En effet, l’orgueil ôte à l’homme son Dieu ; l’envie lui enlève son prochain, la colère l’arrache à lui-même ; une fois dépouillé de tout, il se voit flagellé par l’ennui, puis l’avarice le met dehors, puis la gourmandise le séduit, et, enfin, la luxure en fait un esclave. L’orgueil est l’amour de sa propre excellence ; car l’âme qui en est infectée aime le bien qu’elle possède, exclusivement et indépendamment de celui à la générosité duquel elle le doit. Pernicieux orgueil, que fais-tu ? Pourquoi conseiller au rayon de se séparer du soleil, et au ruisseau de se rendre indépendant de la source ? Est-ce qu’en se privant des eaux de la source, le ruisseau ne se dessèche pas ? Est-ce qu’en refusant la lumière du soleil, le rayon ne se confond pas avec les ténèbres ? Est-ce qu’en refusant de recevoir ce qu’ils n’ont pas encore,

  1. Mat. 6, 9