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DISCOURS SUR LE PSAUME 37.

HOMÉLIE AU PEUPLE, APRÈS L’ÉVANGILE DE LA CHANANÉENNE.

L’AVEU DU PÉCHÉ OU LA PASSION DE JÉSUS-CHRIST.

Le Prophète gémit en se souvenant du repos, il craint le châtiment de Dieu, qui pourtant nous sert pour le salut. Il semble dire que les maux de cette vie doivent lui suffire ; et alors il énumère ce qu’il endure. Sa chair est malade, les flèches de Dieu le transpercent. Il est dans le trouble à la vue de ses péchés, la paix n’est point dans ses os, il est courbé sous le poids de ses fautes, son âme est dans l’illusion, son cœur dans le trouble. Il souffre l’abandon, le faux témoignage, il chancelle et on l’insulte. Toutefois, s’il s’afflige, ce n’est pas du châtiment, mais du crime. Il pratique la justice et implore le secours de Dieu.


1. Cette femme de l’Évangile nous donne une réponse bien analogue à ces paroles que nous avons chantées : « Je publie mon iniquité, je prendrai soin de mon péché »[1], le Seigneur, envisageant les péchés de cette femme, l’appela chienne en disant : « Il ne convient pas de jeter aux chiens le pain des enfants »[2]. Mais elle, qui savait et publier son iniquité, et prendre soin de son péché, ne lui point ce que disait la vérité ; au contraire, elle avoua sa misère et obtint miséricorde en s’inquiétant de son péché. Car elle avait demandé la guérison de sa fille, et peut-être dans sa fille désignait-elle sa propre vie. Écoutez donc le psaume que nous allons, autant que possible, exposer et expliquer tout entier. Que le Seigneur soit dans nos cœurs, afin que nous y trouvions des leçons salutaires, que nous les exposions telles que nous les aurons conçues, les trouvant facilement, les exposant d’une manière convenable.
2. « Psaume de David, pour le souvenir du sabbat »[3]. Tel est le titre du psaume. Nous touchons ce que l’Écriture nous raconte à propos du saint prophète David, qui fut, selon la chair, un des ancêtres de Notre-Seigneur Jésus-Christ[4] ; et, dans toutes les bonnes œuvres qu’elle nous a fait connaître, nous ne trouvons rien qui regarde le souvenir du sabbat. Qu’était-il besoin qu’il se souvint du sabbat que les Juifs observaient avec soin ; quelle mémoire fallait-il pour un jour qui revenait chaque semaine ? Il fallait l’observer, mais il n’était pas nécessaire de s’en souvenir. On ne se souvient, en effet, que d’une chose qui n’est plus devant soi ; ici, par exemple, vous vous souvenez de Carthage où vous êtes allés quelquefois ; et aujourd’hui, vous vous souvenez d’hier, de l’an passé, de toute autre année antérieure, de quelque action que vous avez déjà faite, des lieux que vous avez visités, de quelque scène que vous avez vue. Que signifie, mes frères, ce souvenir du sabbat ? Quelle âme s’en souvient de la sorte ? Qu’est-ce que le sabbat ? car David s’en souvient en gémissant. Vous avez entendu la lecture du psaume, et tout à l’heure, quand nous l’expliquerons, vous entendrez quelle douleur il y témoigne, quels gémissements lui échappent, quels pleurs, quelle tristesse profonde. Mais, bienheureux celui qui est triste de cette manière. C’est ainsi que, dans l’Évangile, le Seigneur appelle heureux quelques-uns de ceux qui pleurent[5]. Comment peut être heureux l’homme qui pleure ? Comment heureux, s’il est malheureux ? Il serait malheureux, au contraire, s’il ne pleurait point. Tel est donc celui qui se souvient ici du sabbat, je ne sais quel homme qui pleure, et puissions-nous être ce je ne sais qui ! C’est une âme qui s’afflige, qui gémit, qui pleure en se souvenant du sabbat. Or, sabbat signifie repos. Assurément, l’interlocuteur était dans je ne sais quelle agitation, puisqu’il gémissait au souvenir du repos.
3. Cet homme donc, redoutant un plus grand malheur que celui dont il était accablé déjà, raconte et offre à Dieu ses agitations. Car il dit clairement qu’il est dans la douleur, et il n’est besoin, pour le comprendre, ni d’interprète, ni de soupçon, ni de conjecture : ses

  1. Ps. 37,19
  2. Mt. 15,26
  3. Ps. 37,1
  4. Rom. 1,3
  5. Mt. 5,5