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elle doit s’en aller comme celle des autres hommes, qu’est-il besoin de verser mon sang ? « La poussière vous confessera-t-elle, ou prêchera-t-elle votre vérité ? » Il y a deux confessions, l’une des péchés, l’autre des louanges. Dans le malheur, nous confessons à Dieu nos péchés, avec componction ; dans la joie, nous chantons avec allégresse la justice de Dieu : gardons-nous toutefois d’être jamais sans aucune confession.
20. « Le Seigneur m’a écouté et m’a pris en pitié ». De quelle manière ? Souvenez-vous de la dédicace du palais. Le Seigneur a écouté, il a pris en pitié. « Il s’est fait mon protecteur »[1].
21. Écoutez maintenant sa résurrection. « Vous avez changé mon deuil en joie : vous avez déchiré mon sac, pour me faire une ceinture d’allégresse »[2]. Quel sac ? Ma mortalité. Un sac est tissu de poils de chèvres et de boucs : et chèvres et boucs ont leur place parmi les pécheurs[3]. Le Seigneur n’a donc pris parmi nous que le sac, et non le mérite du sac ; ce mérite du sac est le péché, tandis que le sac est la mortalité. Lui donc qui ne méritait pas la mort, s’est revêtu d’un corps mortel à cause de toi. Celui qui est pécheur mérite la mort ; mais celui qui n’a commis aucune faute, ne mérite point le sac. C’est lui qui s’écrie en un autre endroit : « Pour moi, quand ils me tourmentaient, je me couvrais d’un cilice »[4]. Qu’est-ce à dire : « Je me revêtais d’un cilice ? » J’opposais à mes persécuteurs ce que je tiens du cilice. Afin que ses persécuteurs le prissent pour un homme, il se dérobait à leurs yeux ; parce qu’ils étaient indignes de voir celui qui s’était revêtu d’un cilice. Vous avez donc rompu le sac « que je portais pour me faire une ceinture d’allégresse ».
22. « Afin que ma gloire vous chante, et que nul aiguillon ne me meurtrisse ». Ce qui s’est accompli dans le chef s’accomplira aussi dans les membres. Qu’est-ce à dire : « Que je ne sois point-aiguillonné ? » Que je ne passe plus par la mort. Car Jésus-Christ fut meurtri à la croix, quand il reçut un coup de lance. Notre chef s’écrie donc : « Que je ne sois plus aiguillonné », ou que je ne meure plus. Mais nous, quel est notre langage à l’égard de cette dédicace du palais ? Que la conscience ne nous stimule plus par l’aiguillon du péché ; que tout nous soit pardonné, et alors nous serons libres. « Afin que je vous chante dans ma gloire », dit le Prophète, et non dans mon humiliation. Si cette gloire est la nôtre, elle est aussi du Christ, parce que nous sommes le corps du Christ. Pourquoi ? Parce que le Christ même, assis à la droite de Dieu, doit dire à quelques-uns : « J’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ». Il est dans le ciel et il est sur la terre ; dans le ciel en lui-même, sur la terre en nous. Que dit-il donc ? « Afin que je vous chante dans ma gloire, et que je ne redoute plus aucun aiguillon ». Ici c’est moi qui gémis dans mon humilité ; là haut, je vous chanterai dans ma gloire. Et enfin : « Seigneur, mon Dieu, je vous confesserai éternellement ». Qu’est-ce à dire : « Je vous confesserai éternellement ? » Je vous louerai dans l’éternité, car nous avons dit qu’il y a une confession de louanges et que la confession ne se dit pas seulement des péchés. Confesse donc aujourd’hui ce que tu as fait contre Dieu, et tu chanteras ensuite la bonté du Seigneur à ton égard. Qu’as-tu fait ? des péchés. Qu’a fait le Seigneur ? Il te pardonne ton iniquité, à condition que tu confesses tes fautes, afin que tu chantes ses louanges dans l’éternité, et que tu ne sois plus aiguillonné par le péché.

  1. Ps. 29,11
  2. Id. 12
  3. Mt. 25,32
  4. Ps. 34,3