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3. « Que mes ennemis ne me tournent plus en dérision[1] ». Qu’ils ne me persiflent point, ceux dont les suggestions occultes et empoisonnées sont autant de pièges ; et qui en me criant : Courage, courage, m’ont avili de la sorte. « Car la déception n’est plus pour ceux qui espèrent en vous ».
4. « Que ceux-là soient couverts d’opprobre, ceux qui font avec moi des actes futiles ». Honte à ceux qui font le mal pour acquérir les biens qui passent. « Mais vous, Seigneur, montrez-moi vos voies, ouvrez-moi vous-même vos sentiers »[2] ; qui ne sont point spacieux, et qui ne conduisent pas la foule à sa perte ; enseignez-moi ces sentiers étroits qui sont les vôtres et que peu connaissent[3].
5. « Faites-moi marcher dans votre vérité », et fuir l’erreur. « Enseignez-moi », puisque de moi-même je ne connais que le mensonge. « C’est vous, ô Dieu, qui êtes mon Sauveur, vous que j’ai attendu tout le jour »[4]. Banni par vous du paradis[5], errant dans les régions lointaines[6], je ne puis retourner à vous si vous ne venez au-devant de moi ; et pendant le cours de cette vie terrestre, votre miséricorde attendait mon retour.
6. « Souvenez-vous, Seigneur, de vos miséricordes »[7]. Souvenez-vous, Seigneur, de vos œuvres miséricordieuses, car les hommes vous accusent d’oubli. « Souvenez-vous de ces bontés qui sont éternelles ». N’oubliez point surtout que vos miséricordes ont commencé avec le monde. Car elles sont inséparables de vous, puisque vous avez assujetti l’homme pécheur à la vanité, mais dans l’espérance, et que vous avez donné à votre créature de si nombreux et si grands sujets d’espérance.
7. « Ne gardez aucun souvenir des fautes de ma jeunesse, et de mon ignorance »[8]. Ne réservez point de châtiment aux fautes que j’ai commises par une témérité audacieuse, et par ignorance, qu’elles soient effacées à vos yeux. « O Dieu, souvenez-vous de moi selon votre miséricorde ». Souvenez-vous de moi, non point selon cette colère dont je suis digne, mais selon cette miséricorde qui est digne de vous. « A cause de votre bonté », et non point à cause de mes mérites.
8. « Le Seigneur est plein de douceur et d’équité »[9]. De douceur, puisqu’il prend en pitié les pécheurs et les impies, jusqu’à leur pardonner leurs fautes passées, mais aussi de justice, car après la grâce de la vocation et du pardon, grâce que nous n’avons point méritée, il exigera au jour du dernier jugement des mérites proportionnés à ces grâces. « Aussi fera-t-il connaître sa loi à ceux qui s’égarent en chemin », car c’est pour les conduire dans la voie, qu’il leur a fait miséricorde.
9. « Il dirige les humbles dans la justice »[10]. C’est lui qui conduira les hommes doux, et qui, au jour du jugement, ne jettera point dans l’effroi ceux qui suivent sa volonté, qui ne résistent pas à la sienne pour lui préférer la leur. « Il enseignera ses voies à ceux qui sont doux ». Il enseignera ses voies, non point à ceux qui les veulent dépasser, comme s’ils étaient eux-mêmes plus capables de se diriger, mais à ceux qui ne savent ni lever la tête, ni regimber quand on leur impose un joug doux et un fardeau léger.[11]
10. « Toutes les voies du Seigneur ne sont que miséricorde et vérité »[12]. Quelles voies peut enseigner le Seigneur, sinon cette miséricorde qui se laisse fléchir, et cette vérité qui le rend incorruptible ? Il exerce la première en nous pardonnant nos fautes, et la seconde en jugeant nos mérites. De là vient que toutes les voies du Seigneur se réduisent aux deux avènements du Fils de Dieu, l’un pour exercer la miséricorde et l’autre le jugement. Celui-là donc arrive à Dieu par le chemin tracé, qui reconnaît que sans aucun mérite il est délivré de ses fautes, qui renonce à l’orgueil, et redoute le sévère examen d’un juge dont il a éprouvé la secourable clémence. « Pour ceux qui recherchent son alliance et sa loi ». Car ils reconnaissent la miséricorde du Seigneur dans son premier avènement, sa justice dans le second, ceux qui recherchent avec douceur et mansuétude le testament par lequel il nous a rachetés pour la vie éternelle, au prix de son sang, qui étudient ses témoignages dans les prophètes et dans les évangélistes.
11. « A cause de votre nom, vous serez miséricordieux pour mes fautes qui sont en si grand nombre »[13]. Non seulement vous avez couvert du pardon les fautes que j’ai commises avant d’arriver à la foi ; mais le sacrifice d’un cœur contrit vous adoucira en faveur de mes péchés qui sont nombreux, car la véritable

  1. Ps. 24,3
  2. Id. 4
  3. Mt. 7,13-14
  4. Ps. 24,5
  5. Gen. 3,13
  6. Lc. 15,17
  7. Ps. 24,6
  8. Id. 7
  9. Id. 8
  10. Ps. 24,9
  11. Mt. 11,30
  12. Ps. 24,10
  13. Id. 11