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ce terrain privé d’ombre ? Où le paysan trouvera-t-il les joncs précieux qui l’abritent ? Nous irions trop loin si nous voulions vous adresser toutes les questions auxquelles la bonne nature a répondu d’avance. Mais ainsi va le monde. L’un commence, le voisin l’imite…, et le ruisseau est sauté. Pourtant je dois féliciter ici une personne qui a résisté à l’épidémie, une femme. C’est à elle que ce pauvre lac Hódos, qui avait plusieurs lieues de long, est redevable de n’être pas entièrement devenu un magasin à foin. Elle a des droits sur le lac, et là jusqu’où s’étend son pouvoir, l’eau est demeurée tranquillement en possession de son bassin. Avec l’eau est restée la douce fraîcheur du soir, et cette multitude d’oiseaux dont la présence éveille seule cette solitude.

Il y a une époque de l’année où la Mezöség s’anime et prend de la vie : c’est lors de la foire aux chevaux. Des haras entiers sont amenés de Hongrie, de Moldavie et des pays voisins. On se réunit au village de Szent-Péter, qui est situé dans un bas-fond formé par plusieurs collines. D’ordinaire silencieuses et désertes, ces collines retentissent alors de mille cris confus ; elles se couvrent d’une multitude de troupeaux, qui se pressent en soulevant des nuages de poussière. Aux hennissements des chevaux, aux mugissements des bœufs et des buffles, répondent les vives paroles des paysans, articulées en vingt langues diverses. La nuit, mille feux s’allument et éclairent cet immense bivac ; et à voir le