Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/262

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

beauté. Mezö signifie champ. Mezöség veut donc dire champ par excellence, une suite de champs, de lieux dépouillés d’arbres. N’est-ce pas notre mot Champagne ?

Depuis quelques années les propriétaires de la Mezöség s’occupent de dessécher leurs étangs sous prétexte de se créer des prairies. L’invention est ingénieuse si l’on veut. Mais je protesterai du fond de Paris contre cette mode inintelligente et barbare. Pour quelques bottes de foin que vous n’êtes pas certains de vendre, Messeigneurs, vous enlevez à tout un pays fort original ce qui fait son caractère, ce qui fait sa vie : vous l’allez rendre mortellement ennuyeux. J’ai souvent pensé, — j’en demande pardon aux propriétaires patentés et éligibles, — j’ai souvent pensé que les forêts, les vallées, les lacs, ces belles choses qui se vendent au profit d’un seul, n’appartenaient pas uniquement au riche qui les achetait ; il me semble qu’elles appartiennent aussi, en quelque manière, à l’artiste, au poëte qui les contemple et s’en inspire. Donc, quand celui-ci a déclaré que telle chose est belle et inviolable, que le possesseur la respecte. Qu’il sème, qu’il récolte, qu’il pèche, c’est son droit. Mais, pour Dieu, qu’il ne ravage rien. On achète la faculté de jouir, non celle de détruire.

D’ailleurs dame nature, comme disaient nos pères, est personne sage et avisée, qui ne donne rien au hasard, mais prévoit et calcule pour nous. Vous desséchez vos étangs ; mais d’où s’élèvera la rosée si nécessaire à