Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/254

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

écrivain qui pour son coup d’essai rompt en visière avec tous les champions de l’époque, et auquel le roi accorde une médaille d’or ? C’est un Hongrois, le comte Joseph Teleki. La réputation de l’auteur se répand en Allemagne. Son père se présente un jour à la cour de Vienne, « — Est-ce vous le Teleki savant ? » lui demande l’empereur, « — C’est mon fils, Sire », répond le comte tout glorieux. Et comme il parlait latin : « — Pourquoi, reprend l’empereur, ne répondez-vous pas au moins en allemand, vous dont le fils écrit si bien le français ? — Ah ! Sire, nous n’avons jamais senti le besoin de savoir la langue de Votre Majesté… »

Les guerres de la révolution et de l’empire, qui portèrent si haut notre gloire militaire, mais nuisirent à notre influence intellectuelle en Europe, rapprochèrent la Hongrie de l’Autriche. Tout naturellement la langue allemande devint familière aux Hongrois, qui l’apprenaient dans les camps. Mais, à l’heure présente, elle est déjà redevenue impopulaire : je ne dis pas aux yeux dit peuple, qui n’a jamais songé à retenir un seul mot allemand, mais dans l’esprit de la noblesse. On ne parle plus que le hongrois dans les salons de Pesth : avec les étrangers on se sert de préférence du français. La langue des Autrichiens est si peu aimée en Transylvanie que les vieux soldats, de retour au village, ne se vantent jamais de la savoir. J’ai vu souvent d’anciens militaires qui avaient tenu garnison pendant quinze ans à