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la douleur infinie d’un Dieu, il obtiendra le bonheur infini, qu’il ne doit pas l’espérer dans ce monde, qu’il doit vivre dans la pensée perpétuelle de la mort, dans un tombeau.

Mais ce tombeau est grandiose et magnifiquement orné. Les artistes romans n’ont pas sacrifié à l’utilité de la voûte la commodité et l’ampleur de la basilique. Au contraire, ils l’allongent, surtout ils l’élargissent, profitant de la solidité acquise pour donner à tout l’édifice plus de grandeur.

Merveilles sévères, que l’art gothique ne fera pas oublier : Cluny, qui fut la plus vaste des églises de ce style, mais dont il ne nous reste que des débris ; la Trinité de Caen, Jumiège, Notre-Dame-du-Port à Clermont, Notre-Dame-la-Grande à Poitiers, Saint-Savin, Moissac, Cahors, Saint-Sernin de Toulouse, Saint-Lazare d’Avallon, Paray-le-Monial, Vézelay, Autun, Beaune, Saint-Martin-d’Ainay à Lyon, Saint-Trophime d’Arles, Carpentras, Nîmes, Angoulême et Saint-Front de Périgueux, avec leurs voûtes triomphant en coupoles, et, belle entre les plus belles, la cathédrale du Puy.

La beauté plastique de la peinture, du vitrail et de la sculpture commente la beauté spirituelle et comme abstraite de ces monuments. Écritures variées et concordantes. L’entente est parfaite entre les quatre principaux artistes. La même pensée les anime, l’émulation les unit, nulle rivalité ne les divise. C’est le maître de l’œuvre qui commande, l’architecte ; c’est lui qui a fait le premier geste. Les peintres et les verriers, précédés eux-mêmes par les miniaturistes, les mosaïstes, les ivoiriers, les orfèvres, sont entrés avant le sculpteur, nous l’avons dit, dans ce concours de beauté.

Il n’y a pas longtemps, en ce qui concerne les peintres, que cette certitude nous est acquise. Elle s’appuie chaque jour, grâce aux recherches des archéologues, sur de plus abondantes preuves : nous possédions dès le XIe siècle, en peinture, un art du plus grand style.

Depuis la découverte des fresques de Saint-Sernin, par Mérimée, nombre d’autres merveilles du même ordre nous ont été rendues. Par exemple, les fresques de Saint-Jacques-de-Guérets ont été découvertes en 1891, celles de Berzé-la-Ville en 1893. Les recherches se poursuivent, reprennent, en quelque sorte, in extremis, des chefs-d’œuvre au temps qui les efface et dans le moment même où ils allaient disparaître. Nous savons maintenant, avec certitude, ce qu’on pouvait à peine soupçonner il y a quarante ans, qu’un grand nombre d’églises et de chapelles