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et il y est même incorporé, dans quelques rares basiliques, dès le IXe siècle. Il n’y sera, toutefois, définitivement et universellement absorbé que dans la période romane ; encore, conservant son sens d’introduction, d’initiation, restera-t-il presque toujours placé près de la porte.

Le clocher, indiqué dans les mosaïques de Rome du Ve siècle, réalisé dès 470 à Saint-Martin de Tours, est encore isolé dans les églises de Ravenne, les plus complètes que nous ait laissées le VIe siècle. Lui aussi, pour se réunir au monument dont il est l’achèvement logique et comme la définition, puisqu’il signifie l’appel de la terre au ciel, il attend l’avènement du style qui assurera par la voûte la solidité de tout l’édifice. La voûte seule permettra à la façade, devenue robuste, de supporter cette formidable masse de pierre et de bronze.

L’atrium subira des vicissitudes très diverses selon les temps et les contrées. Ici, on sera forcé de le sacrifier à cause de la cherté croissante des terrains. Là, on pourra le sauver, sous la forme nouvelle du parvis (paradisus) qui, s’exagérant même en maints endroits, deviendra le cimetière de la commune, le petit cimetière des villains, tandis que les seigneurs et les clercs de marque auront dans l’église même leur tombeau, sujet offert au talent des sculpteurs romans : ils varieront sur ce thème en d’innombrables chefs-d’œuvre.

Quant au corps principal du monument, l’église proprement dite, longtemps son aspect extérieur reste morose et dénué. Comme si l’on avait conscience que, dans les grosses parties de l’œuvre, on ne peut faire encore que du provisoire, ce n’est pas à celles-ci qu’on s’applique. Les efforts décoratifs ne vont point à la couverture de l’ombre, aux murs qui la limitent. Ils tendent uniquement à embellir l’intérieur du temple, et là c’est déjà un véritable luxe de mosaïque et de marqueterie, de feuilles de marbre et de stuc, de peinture à la fresque. Un plafond de bois, sculpté ou peint, dissimule la couverture en charpente.

Les symboles imaginés aux catacombes fournissent aux peintres la plupart des sujets de leurs compositions : l’Agneau, les vingt-quatre Vieillards, les Quatre Fleuves, et le Christ, la Vierge, les Apôtres étaient représentés sur les parois de l’abside. Dans la nef, les saints et les saintes, en procession, entraînaient les regards des fidèles vers les figures, d’un ordre plus élevé dans la hiérarchie sacrée, qui ornaient le chœur. Une pensée voisine de celle qui retenait le baptistère près du seuil abandonnait l’atrium aux représentations des scènes de l’Ancien Testament : ainsi l’humanité avait été préparée à la Rédemption par les Prophéties.