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plans obliques à l’axe du monument, qui tout à la fois enrichissent, commentent l’unité de sa grandeur et provoquent la demi-teinte. On retrouve ces biais dans les bas-reliefs, et jusque dans les figures sculptées aux voussures des portes ; c’est l’universel procédé du travail gothique, et c’est ainsi partout la même douceur intelligente et sensible, accompagnée de la même énergie.


Je voudrais faire aimer cet art grandiose, concourir à sauver ce qu’il en reste encore d’intact, réserver pour nos enfants la grande leçon de ce passé que le présent méconnait.

Dans ce désir, j’essaie d’éveiller les esprits et les cœurs à la compréhension et à l’amour.

Mais je ne puis tout dire. Allez voir. Et surtout regardez avec simplicité, avec docilité. Consentez au travail et au respect.

Étudions ensemble…


II


— Par où commencer ?

— Il n’y a pas de commencement. Prenez comme vous arrivez, arrêtez-vous à ce qui vous séduit d’abord. Et travaillez ! Vous entrerez petit à petit dans l’unité. La méthode naîtra des proportions de l’intérêt ; les éléments que votre regard sépare, dans leur premier aspect, pour les analyser, vont s’unir et composer le tout.

Dans le doux exil du travail on apprend d’abord la patience, qui elle-même nous enseigne l’énergie, et celle-ci nous donne la jeunesse éternelle, faite de recueillement et d’enthousiasme. De là, on peut voir et comprendre la vie, cette vie délicieuse que nous dénaturons par les artifices de notre esprit peu aéré, entourés pourtant que nous sommes des chefs-d’œuvre de la nature et de l’art ; mais nous ne les comprenons plus, oisifs en dépit de notre agitation, aveugles environnés de splendeurs.

Si nous parvenions à comprendre l’art gothique, nous serions irrésistiblement ramenés à la vérité.