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inquiétudes, des éléments de consolation ou quelque motif d’espérance. Qu’on prétende voir dans l’art le reflet d’hier ou l’aurore de demain, nous ne pouvons le séparer de notre vie ; il en est l’expression la plus intense. Comment donc resterait-il étranger aux préoccupations d’une heure, comme la nôtre, si terriblement critique, où, sinon la société, du moins le mode de notre existence sociale est mis en question ?

L’art contemporain exprime ces préoccupations avec une intensité et une lucidité également extraordinaires. C’est lui qui prend l’initiative de ce signal du rassemblement que réclame toute l’humanité clairvoyante.

Il le fait en deux gestes, ce signal, dans notre pays, où le mouvement nécessaire se dessine plus tôt que nulle part ailleurs, et l’un et l’autre gestes se caractérisent par la résolution — où l’instinct a beaucoup de part, sans doute, et heureusement, car il est le signe de la force vitale — de remonter aux sources du génie national et aux premiers principes de l’art éternel.

Ces deux gestes, ces deux symptômes, non pas uniques, mais capitaux entre tous, nous dispensent d’examiner les autres.

Le premier est l’impressionnisme.

L’observation appartient à M. Adrien Mithouard[1] et il lui a donné tous les développements qu’elle comporte ; nous ne pouvons que les résumer.

On n’entend pas exagérer l’impressionnisme jusqu’à l’égaler, en importance, à l’art gothique. Ce ne sont pas des Cathédrales que Monet et Pissarro construisent avec leurs pinceaux. Mais si nous constatons entre les deux arts, en dépit de cette inégalité, des rapports singuliers, significatifs, notamment des traits de race qui semblent indéniables, sera-t-il excessif de dire que le génie national, d’où l’art gothique naquit, s’est réveillé chez nous, sous une forme nouvelle, au moment même où les savants le découvraient, le retrouvaient dans le passé ?

Ils ont d’abord ce grand trait de parenté : « ils sont deux enfants de la même terre et leurs manifestations s’y localisent fortement ». Nous l’avons vu pour l’art gothique, dont le centre est à Saint-Denis (Île-de-France) : « Le centre et l’origine de l’impressionnisme sont à Bougival (Île-de-France). Le déplacement de l’axe est peu sensible. »

Tous deux doivent beaucoup à l’Orient. Une première inspiration orientale

  1. Le Tourment de l’Unité.