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coup de fusil retentit ; et l’on vit aussitôt le couguar sauter à terre et repartir, en bondissant, d’une façon à nous convaincre qu’il n’avait nulle envie de supporter plus longtemps notre feu. Les chiens détalèrent après, d’une ardeur au moins égale, et en criant à tue-tête. Le chasseur qui avait tiré nous rejoignit ; sa balle, nous assura-t-il, avait frappé le monstre dont l’une des jambes devait être cassée, près de l’épaule, seule place où il eût pu l’ajuster. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’une légère trace de sang marquait la terre ; mais les chiens allaient d’un tel train, que nous ne pûmes en faire la remarque qu’en courant ; et l’éperon dans le ventre de nos chevaux, nous nous lançâmes à plein galop vers le centre du marais. Une rivière fut traversée, puis une autre plus large et plus bourbeuse ; et les chiens allaient toujours ! Les chevaux commençaient à souffler d’une furieuse manière ; nous jugeâmes qu’il vaudrait mieux les laisser et continuer à pied. Ces déterminés chasseurs savaient que le couguar, étant blessé, ne tarderait pas à remonter sur un autre arbre, où, selon toute probabilité, il resterait plus longtemps cette fois, et qu’il nous serait aisé de nous diriger sur la trace des chiens. Nous descendîmes, ôtâmes selles et brides à nos chevaux, et après leur avoir pendu des sonnettes au cou, les abandonnâmes ainsi, chacun à ses propres ressources.

Maintenant, cher lecteur, suivez la troupe qui s’enfonce au plus profond du marais, à travers des étangs fangeux, se frayant comme elle peut un passage par-dessus des troncs renversés, au milieu d’un inextricable