Page:Audoux - Le Chaland de la reine, 1910.pdf/14

Cette page n’a pas encore été corrigée

à côté d’un carré de plantes vertes et de pots de fleurs, Michel aperçut la reine du chaland.

Elle se tenait assise sur un joli siège, sa robe blanche se relevait très haut sur ses jambes, qu’elle tenait croisées l’une sur l’autre, et le chien qui était couché à ses pieds était de la même couleur que ses bas.

Ses cheveux flottants descendaient jusqu’à sa ceinture et, de chaque côté de son front, des nœuds de rubans se mêlaient à des mèches, bouclées, qui retombaient le long des joues.

Elle ne ressemblait pas aux autres filles des mariniers et, en la voyant, on comprenait qu’il lui fallait le plus beau bateau du monde.

Aussitôt Michel se rappela la suite de l’histoire que lui racontait son père : « Et le marinier qui avait ce bateau si joli, si joli, avait une fille si belle, si belle, que tous les rois de la terre voulaient l’épouser. »

Michel se leva quand le chaland passa devant lui. Le mouvement qu’il fit réveilla le chien, qui se dressa en aboyant, mais la fille du marinier étendit seulement la main pour le calmer, et elle sourit à Michel. À ce moment, le soleil n’éclairait plus que le haut de la montagne ; le fleuve était devenu plus transparent qu’un miroir ; on ne savait plus si la montagne était en haut ou en bas ; le pré se continuait jusqu’au milieu du fleure, et on voyait les longues herbes trembler dans l’eau. Maintenant, le son des clochettes diminuait et le chaland