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Mais parce que cette vapeur bouge et se déplace, Églantine en prend de l’effroi. Elle a beau se dire que c’est encore le vent qui siffle si bizarrement dans les joncs et les osiers, tantôt ici et tantôt là, elle ne parvient pas à surmonter son effroi. Et voici qu’autour d’elle d’autres bruits s’élèvent, des frôlements dans les fougères, des courses subites et brèves, des cris aigus qui la font sursauter d’angoisse. Ces bruits, elle les a déjà entendus. Elle n’ignore pas qui les produit. Mais alors elle était avec Noël. Elle voudrait partir, la nuit n’est pas si noire qu’elle ne puisse se diriger entre les arbres. Mais elle est paralysée par la peur. Cette peur, qu’elle croyait avoir laissé au Verger, l’a suivie jusqu’ici et lui serre la nuque comme des doigts durs et froids. Pour lui échapper, elle essaye de penser à Noël, elle essaye de penser à mère Clarisse, mais à peine évoqués ces deux-là s’enfuient, comme pris de peur eux-mêmes.

Longtemps, longtemps, elle tressaille et frémit. Puis le vent cesse de siffler dans les joncs et les osiers, la couverture blanche de l’étang reste immobile et bien bordée, et le silence n’est plus troublé que par le doux balancement des branches qui l’abritent et la bercent lentement. Rassurée un peu, mais