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tendre les paroles de Mlle Charmes : « Ils ont de la terre, beaucoup de terre ». Attristée un peu, elle répéta tout haut ces paroles en ajoutant :

— Et moi je ne suis pas la fille d’un riche marchand.

Noël la serra contre lui.

— Ils ont de la terre ? Qu’ils la gardent ! Moi j’ai ma femme et j’y tiens.

Le front un peu plissé il reprend :

— Et puis, vivant loin d’eux, ne suis-je pas aussi pauvre que toi ?

Rasséréné il se lève d’un bond, et chante avec entrain la chanson du mendiant des routes :


    Je n’ai qu’une chemise,
    Je la lave souvent
    La pluie fait la lessive
    Et je la sèche au vent.


Églantine s’est mise debout aussi pour chanter avec lui. Et à l’idée d’une si grande pauvreté, tous deux rient à en perdre haleine.

Au moment où ils allaient gagner le bois du gros orage, ainsi qu’ils le nommaient, ils virent au loin sur la route, Luc qui marchait la tête basse et les mains derrière le