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mencer une nouvelle campagne, et seront-ils sans pitié pour ces incorrigibles Parisiens !

Cependant les bataillons fédérés traversent les rues au milieu de la foule inquiète et sympathique. En tête, derrière le chef de bataillon à cheval, marchent les cantinières, jeunes femmes coquettes jusque dans la mort, pimpantes sous leur joli costume militaire, le baril d’eau-de-vie sur la hanche, le chassepot en bandoulière, un petit sabre au côté, s’avançant d’un pas résolu, mêlant un sourire de fierté féminine à la gravité du drame, épanouies comme des fleurs sur une tombe. Tout à l’heure, sur le champ de bataille, vous les verrez impassibles courir aux blessés, ramasser les morts, ou prendre le fusil et faire le coup de feu, pour venger un amant, un mari, un frère, blessé, tué, sœurs de charité de la Révolution qui ne croient pas aux miracles en accomplissant des miracles de dévouement et d’héroïsme.

Mais le régiment s’arrête devant la mairie. Il vient chercher son drapeau, le drapeau rouge à franges-d’or surmonté du bonnet phrygien, portant dans sa cravate le numéro du bataillon, et, au milieu, brodés en lettres d’or aussi, ces mots :

COMMUNE DE PARIS.

Il n’a pas voulu marcher au feu avec le vieil étendard tricolore qui a roulé dans la boue de Sedan hier, qui se baigne aujourd’hui dans le sang du peuple, que les Bonaparte repassent aux Louis-Philippe, et que Trochu vient de remettre, souillé mais intact, aux mains de Thiers.

Les hommes forment le carré sur la place, les officiers au centre avec la musique. Les membres de la Commune, l’écharpe au côté, descendent portant l’étendard de la Révolution. Ils le con-