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sous la pluie, avec une mauvaise vareuse, un pantalon trop mince, des chaussures qui prenaient l’eau, — restes de l’équipement dû à la munificence de Trochu, et que la Commune n’avait pu encore remplacer.

Dans quelques quartiers aristocratiques, dont les habitants avaient été porter leur peur et leur haine à Versailles, les magasins furent, au contraire, fermés et abandonnés par leurs propriétaires, et ces devantures closes qui bordaient les rues comme autant d’insultes, comme autant de menaces au peuple victorieux, restèrent respectées. Pas une ne fut enfoncée. Pas une n’eut à compter avec la colère, avec la justice de ce peuple tout puissant et poussé à bout.

Et pourtant que de représailles il aurait pu exercer !

Ce peuple, c’était celui qu’on fusillait prisonnier à Versailles !

Ce peuple, c’était celui qu’on surprenait, la nuit, endormi dans les avant-postes, à l’aide d’un mot d’ordre vendu, et qu’on égorgeait froidement !

Ce peuple, c’était celui qu’on bombardait sans relâche, portant la mort au hasard, dans les maisons, tuant l’enfant au berceau à côté de la mère qui veillait, pendant que le mari combattait là-bas, dans Neuilly ou dans les forts !

Cé peuple, c’était celui qu’on dépeignait à la France stupéfaite, à l’Europe ahurie, comme un ramassis de bandits et de forçats en rupture de ban !

Ce peuple, c’était celui qu’on accusait de promener le pillage et le meurtre dans les rues labourées par les boulets conservateurs !

Et qu’auriez-vous dit, que seriez-vous devenus,