Page:Armaingaud - La Boétie, Montaigne et le Contr’un - Réponse à M. P. Bonnefon.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne pas comprendre. Dire que personne n’y entendait goutte, c’est décider la question par la question, c’est répéter que le portrait du tyran n’est pas celui d’Henri III, ce que M. Bonnefon affirme bien, mais qu’il n’a pas, à un degré quelconque, réussi à démontrer.

A-t-il été plus heureux en discutant les allusions au règne des favoris ? C’est sur ce point, semble-t-il, que porte son plus grand effort. Il ne cherche pas, par une comparaison entre la politique d’Henri dans ses trois situations successives et l’organisation du pouvoir tyrannique, tel que le décrit le Contr’un, à établir que le parallélisme signalé par moi n’est pas exact. Ici encore, c’est une date qu’il m’oppose, et il la trouve dans un texte du Journal de l’Estoile qui m’avait échappé comme il avait échappé jusqu’à ce jour à M. Bonnefon lui-même. Cet argument, il y tient beaucoup ; c’est, dans sa réfutation de la première partie de ma thèse, comme un leit-moliv ; il y revient jusqu'à cinq fois. Il est pourtant, on va le voir, de nul effet.

On a toujours pensé que la première édition des Mémoires de l’État de France sous Charles neufiesme, dans le troisième volume desquels a paru le texte intégral du Contr'un, est de 1576. Il pouvait donc être fait allusion aux événements des d’eux premières années du règne d’Henri III (de septembre 1574 à la fin de 1576) et j’avais soutenu que de telles allusions s’y reconnaissent. Mais toute cette partie de votre thèse s’écroule, dit en substance M. Bonnefon, si je vous apporte un document qui établisse que la publication des Mémoires a eu lieu deux ans plus tôt. Or, ce document existe : l’Estoile note soigneusement dans son Registre, Journal du Règne d’Henri III, que les Mémoires de l’Estat et Religion de France sous Charles IX, ont paru en 1574 au mois d’octobre. Il en « possédait » même un exemplaire à cette date. « Je ne connais pas cette édition de 1574 qui est fort rare et que j’ai vainement cherchée, ajoute M. Bonnefon, mais elle a existé et doit exister encore dans quelque bibliothèque Elle se compose de trois volumes in-8, de près de mille pages chacun... »

Voilà qui est précis, et d’une bien sûre information. Eh bien, cette édition de 1574, dont l’imagination de M. Bonnefon lui a seule permis de connaître le nombre des pages, n’a jamais existé. Il pourra la chercher longtemps encore sans succès ; et jusqu’à ce qu’il en ait rencontré un exemplaire, il ne saurait en aucune manière s’en faire un argument, non plus que de la note de l’Estoile.

M. Bonnefon laisse échapper une première erreur, en disant que l’Estoile « possédait » un exemplaire d’une édition des Mémoires en 1574. L’Estoile dit seulement que c’est en ce temps (octobre 1574)