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à réaliser ce qui est le mieux possible dans des conditions données, il faut en conclure que ce n’est pas parce que l’homme a des mains qu’il a une intelligence supérieure, mais que c’est au contraire parce qu’il est éminemment intelligent qu’il a des mains. C’est en effet le plus intelligent des êtres qui pouvait se bien servir du plus grand nombre d’instruments ; or la main n’est pas un instrument unique ; elle est plusieurs instruments à la fois. Elle est, on peut dire, un instrument qui remplace tous les instruments.

§ 16[1]. C’est donc à l’être qui était en état de pratiquer le plus grand nombre d’arts et d’industries que la nature a concédé la main, qui, de tous les instruments, est applicable au plus grand nombre d’emplois. On a bien tort de croire que l’homme est mal partagé et que sa constitution est inférieure à celle de tous les animaux, parce que, dit-on, l’homme n’est pas aussi

  1. La nature a concédé… Voir plus haut, § 14. — Applicable au plus grand nombre d’emplois. Il serait difficile de trouver rien de plus juste et de plus vrai ; et la supériorité de l’homme sur le reste des animaux éclate dans la conformation de sa main, presque autant que dans les facultés de son intelligence. — Que l’homme est mal partagé. La science, aidée de la raison, n’a jamais trouvé des arguments plus simples ni plus forts. — Parce que, dit-on. Il serait curieux de savoir à qui Aristote répond dans ce passage ; c’étaient sans doute les Sophistes, qui avaient soutenu cette opinion. — Parce qu’il est nu. C’est déjà la pensée reproduite en termes si simples et si grands par Pline : « Nudum et in nudo humo », Livre VII, ch. I.