Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49
LIVRE I, CH. VII, § 5.

le passé[1] puisse jamais être davantage dans le présent[2] ; et ceci s’applique tout aussi bien, et à la qualité, et à la quantité, et au lieu[3]. Par exemple, s’il a été impossible qu’un corps soit devenu blanc[4], ou qu’il soit devenu grand d’une coudée[5], ou qu’il se trouvât en Égypte[6], il est également impossible, dans le temps actuel, qu’il en soit ainsi. Il est donc impossible aussi qu’un corps soit porté dans un lieu où il n’est pas possible[7] qu’aucun corps parvienne jamais par un mouvement quelconque. § 4. De plus, en supposant même[8] que les parties de l’infini soient séparées et isolées, le feu total, par exemple, qui serait formé de toutes les parcelles de feu, n’en serait pas moins infini. § 5. Mais nous avons établi[9] que le corps est ce qui a une dimension en tous sens ; dès lors, comment serait-il

  1. J’ai ajouté ces mots pour éclaircir la pensée, qui autrement resterait obscure.
  2. Même observation.
  3. Qui sont les trois espèces du mouvement ; voir la Physique, livre V, ch. 3, § 10, tome II, page 295 de ma traduction.
  4. C’est un mouvement dans la qualité.
  5. Mouvement de quantité.
  6. Mouvement de lieu.
  7. Si le lieu était infini, le corps ne pourrait jamais arriver en haut, pas plus qu’il ne pourrait jamais arriver en bas, puisque l’infini est infranchissable.
  8. J’ai dû ici paraphraser le texte, dont la concision est extrême ; et j’ai suivi, pour le sens que j’adopte, le commentaire de Simplicius et celui de saint Thomas. C’est une objection à laquelle Aristote semble répondre. On soutient que l’infini n’est pas un continu, mais qu’il se compose de parties séparées et diverses ; la continuité n’est pas nécessaire, et par exemple toutes les parcelles de feu, en se réunissant, peuvent faire que l’élément du feu soit infini, bien que d’abord elles fussent séparées les unes des autres. Simplicius croit que ce passage est une critique indirecte du système d’Anaxagore sur les Homœoméries ; mais il semblerait se rapporter plutôt aux atomes de Démocrite. Il faut reconnaître d’ailleurs que le texte reste toujours très-obscur, parce qu’il n’est pas ici encore assez développé.
  9. Voir plus haut ch. 1, § 4, page 4. C’est d’ailleurs un nouvel argument pour démontrer que l’infini ne peut pas