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XII
PRÉFACE

plus ou moins étrangères à celles-là. « Par exemple de l’idée du lait, l’esprit passe à l’idée du blanc, du blanc à l’air, de l’air à l’humidité ; et à l’aide de cette dernière notion, il se rappelle l’automne, saison qui était précisément ce qu’il cherchait. » Dans cette association rapide des idées, l’esprit se porte le plus volontiers à celles qui lui sont le plus ordinaires ; et de là parfois ses erreurs, et parfois aussi le succès de ses efforts.

Dans la mémoire et dans la réminiscence, le point capital, c’est le temps. Notre esprit est doué de la faculté de connaître les distances de temps, comme il connaît les distances d’espace : il discerne et retient les proportions des unes et des autres avec une merveilleuse délicatesse, bien que ce ne soit pas toujours avec une parfaite exactitude. Ainsi l’on se rappelle quelquefois qu’on a fait une chose dans un temps passé ; mais l’on ne saurait préciser ce temps : ou bien, au contraire, on se rappelle fort distinctement le temps où l’on a fait quelque chose, et l’on ne se rappelle pas précisément la chose elle-même. L’acte de la mémoire ou de la réminiscence n’est complet que quand le mouvement de l’esprit relatif à l’objet coïncide avec le mouvement relatif au temps.