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VII
PRÉFACE

c’est ce qu’on appelle proprement la mémoire. Tantôt le souvenir est incomplet et indirect : l’esprit alors ne retrouve qu’un fragment de ce qu’il cherche ; ou bien pour arriver à l’objet qu’il poursuit, il part d’un autre objet qui est en un rapport quelconque avec celui-là ; et nous avons besoin d’un effort plus ou moins considérable de notre volonté pour recomposer le reste du souvenir, ou pour en ressaisir l’objet propre : c’est ce qu’Aristote appelle la réminiscence, mot qu’il n’invente pas, mais qu’il détourne du sens que Platon lui avait parfois prêté.

La distinction de la mémoire et de la réminiscence est essentielle, et elle est parfaitement justifiée par les faits eux-mêmes. Plus tard on a essayé de lui en substituer d’autres, comme on l’a parfois omise ; et l’on s’est également trompé, soit en l’ignorant, soit en prétendant la remplacer.

Après cette distinction, qui ressort de la division du traité et même de son titre, Aristote circonscrit et étudie l’objet spécial de la mémoire. Cet objet appartient toujours au passé ; la mémoire n’a pas de prise sur le présent ni sur l’avenir. Aussi, « toutes les fois qu’on fait acte de souvenir, on se dit dans l’âme qu’on a entendu antérieurement la chose dont on se souvient, qu’on l’a sentie ou qu’on l’a pensée. »