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si elle eût vécu d’une vie aussi énergique et aussi belle, si elle eût enfanté de tels chefs-d’œuvre et porté des fruits si savoureux ? Sans doute, la race Hellénique était admirablement douée ; et elle a réussi dans le domaine de la philosophie à peu près comme dans tous les autres. Mais ces qualités merveilleuses eussent pu ne pas s’épanouir aussitôt, si la sève se fût épanchée d’abord dans d’autres canaux, et notamment dans ceux de la religion. La mythologie n’était qu’une sorte de jeu pour les imaginations ; les facultés plus hautes de l’âme devaient se prendre ailleurs et chercher un aliment plus substantiel et plus vrai. Je suis très loin de nier les bienfaits des religions, et je pense qu’il est bon qu’elles aient toujours et chez tous les peuples précédé la philosophie ; mais je ne puis m’empêcher de penser que, si la religion des Hellènes eut été plus sérieuse, leur philosophie et leur science l’eussent été peut-être beaucoup moins, dommage irréparable pour la Grèce, et pour nous, qui ne sommes que ses enfants et ses continuateurs.

Enfin, tout en attribuant à l’Asie-Mineure et à ces petites républiques Grecques qui en occupaient les côtes, la gloire insigne d’avoir inventé la philosophie et la science, avec la poésie, la musique et tant d’autres arts, j’entends bien ne porter aucune atteinte à la gloire incomparable d’Athènes. D’abord c’était