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aux tribunaux ? Est-ce là le système le plus équitable selon le droit démocratique ? Ou faut-il donner la préférence à celui qui ne tient absolument compte que du nombre ? À entendre les partisans de la démocratie, la justice est uniquement dans la décision de la majorité ; à en croire les partisans de l’oligarchie, la justice est la décision des riches ; car à leurs yeux la richesse est la seule base raisonnable en politique.

§ 12. De part et d’autre, je vois toujours inégalité, injustice. Les principes oligarchiques mènent droit à la tyrannie ; car si un individu est plus riche à lui seul que tous les autres riches ensemble, il faut, en suivant les maximes du droit oligarchique, que cet individu soit souverain ; car il a seul vraiment le droit de l’être. Les principes démocratiques mènent directement à l’injustice ; car la majorité, souveraine par son nombre, se partagera bientôt les biens des riches, ainsi que je l’ai déjà dit. Pour trouver une égalité que chaque parti puisse admettre, il faut la chercher dans le principe même que tous deux donnent à leur droit politique. Ainsi, des deux côtés, on soutient que la volonté de la majorité doit être souveraine.

§ 13. J’admets donc ce principe ; mais je le limite. L’État se compose de deux parties, les riches et les pauvres ; que la décision des uns et des autres, c’est-à-dire de leur double majorité, fasse loi. S’il y a dissentiment, que ce soit l’avis des plus nombreux et de ceux dont le cens est le plus considérable qui l’emporte. Supposons dix riches et vingt pauvres ; six riches pensent d’une façon, quinze pauvres pensent d’une autre ; les quatre riches