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l’argent que roulent l’acquisition et la vente ; et cependant cet argent n’est en lui-même qu’une chose absolument vaine, n’ayant de valeur que par la loi et non par la nature, puisqu’un changement de convention parmi ceux qui en font usage peut le déprécier complètement, et le rendre tout à fait incapable de satisfaire aucun de nos besoins. En effet, un homme, malgré tout son argent, ne pourra-t-il pas manquer des objets de première nécessité? Et n’est-ce pas une plaisante richesse que celle dont l’abondance n’empêche pas de mourir de faim? C’est comme ce Midas de la mythologie, dont le vœu cupide faisait changer en or tous les mets de sa table.

§ 17. C’est donc avec grande raison que les gens sensés se demandent si l’opulence et la source de la richesse ne sont point ailleurs ; et certes la richesse et l’acquisition naturelles, objet de la science domestique, sont tout autre chose. Le commerce produit des biens, non point d’une manière absolue, mais par le déplacement d’objets déjà précieux en eux-mêmes. Or c’est l’argent qui paraît surtout préoccuper le commerce ; car l’argent est l’élément et le but de ses échanges ; et la fortune qui naît de cette nouvelle branche d’acquisition semble bien réellement n’avoir aucune borne. La médecine vise à multiplier ses guérisons à l’infini ; comme elle, tous les arts placent dans, l’infini l’objet qu’ils poursuivent, et tous y prétendent