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deux égards, noblesse et beauté, ses rivaux l’emportent sur lui beaucoup plus que lui-même ne l’emporte sur eux comme virtuose ; je soutiens que c’est toujours à lui qu’appartient l’instrument supérieur. Autrement, il faudrait que l’exécution musicale profitât beaucoup des supériorités de naissance et de fortune ; mais ces avantages ne peuvent y procurer le plus léger progrès.

§ 4. A suivre encore ce faux raisonnement, un avantage quelconque pourrait entrer en parallèle avec tout autre. Parce que la taille de tel homme l’emporterait sur la taille de tel autre, il s’ensuivrait qu’en règle générale la taille pourrait être mise en balance avec la fortune et la liberté. Si, parce que l’un est plus distingué par sa taille que l’autre par sa vertu, on place en général la taille fort au-dessus de la vertu, les objets les plus disparates pourront être mis dès lors au même niveau ; car si la taille à certain degré peut surpasser telle autre qualité à certain degré, il est clair qu’il suffira de proportionner les degrés pour obtenir l’égalité absolue.

§ 5. Mais comme il y a ici une impossibilité radicale, il est clair qu’on ne prétend pas le moins du monde, en fait de droits politiques, répartir le pouvoir selon toute espèce d’inégalité. Que les uns soient légers à la course et les autres fort lents, ce n’est pas une raison pour qu’en politique les uns aient plus et les autres moins ; c’est aux jeux gymniques que ces différences-là seront appréciées à leur juste valeur. Ici, on ne doit nécessairement mettre en concurrence que les objets qui contribuent à la formation de l’État. Aussi a-t-on toute raison d’accorder une distinction particulière à la noblesse, à la liberté, à la fortune ; car