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LIVRE I, CH. I, § 23.

Ce n’est pas, selon nous, une erreur complète que de se faire une idée du bien et du bonheur par la vie qu’on mène soi —même. Ainsi les natures vulgaires et grossières croient que le bonheur, c’est le plaisir ; et voilà pourquoi elles n’aiment que la vie des jouissances matérielles. C’est qu’en effet il n’y a que trois genres de vie qu’on puisse plus particulièrement distinguer : d’abord cette vie dont nous venons de parler, puis la vie politique ou publique, et enfin la vie contemplative et intellectuelle. § Il. La plupart des hommes, tels qu’ils se montrent, sont de véritables esclaves, choisissant par goût une vie de brutes ; et ce qui leur donne quelque raison et semble les justifier, c’est que le plus grand nombre de ceux qui sont au pouvoir n’en profitent d’ordinaire que pour se livrer à des excès dignes de Sardanapale. § 12. Au contraire, les esprits distingués et vraiment actifs placent le bonheur dans la gloire ; car c’est là le but le plus habituel de la vie politique. Mais le bonheur ainsi compris est quelque chose de plus superficiel et de moins solide que celui qu’on prétend chercher ici. La gloire et les honneurs semblent appartenir à ceux qui les dispensent bien plutôt qu’à celui qui les reçoit, tandis que le bien tel que nous le proclamons est quelque chose qui est tout personnel,