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LA RETRAITE.

Et, ce que fait le bramine, tout le monde, lui Soran surtout, peut le faire : une exacerbation de la volonté, une exagération de l’énergie avec un entraînement et un régime propres, paraissent suffisants. C’est cette puissance qu’il voulait acquérir, non pour étonner les gens, mais pour lui, pour son bonheur intime. Et, quand il s’élevait, comme en ce moment, dans la première joie de sa retraite, à de si hautes pensées, ses primitives appétences d’amitié et d’affection disparaissaient et il se renfermait dans un égoïsme sublime ; dans ses voyages, du reste, il rencontra des affections ou des amours plutôt ; ils l’alléchèrent d’abord, puis il les trouva faibles ou faux, et il les rejeta comme indignes de lui : il n’avait plus maintenant qu’un seul désir, se dégager, se défendre de toute influence étrangère, concentrer et condenser sa personnalité, sublimer sa volonté ; le retour sur soi-même et la prière lui semblaient avec la parfaite chasteté l’un des moyens de réaliser ce rêve si chéri.

Il priait, et, souvent maintenant, dans sa vieille chapelle gothique, comme autrefois à Juilly, mais avec une plus ardente foi, un esprit merveilleusement affiné et voyant, il s’abîmait dans la contemplation d’invisibles visions, et les choses extérieures n’ayant plus sur lui aucune ac-