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L’ENFANCE.

création de quatre heures, il venait chercher Jacques. Ils s’éloignaient de la bruyante cour, tous deux seuls, dans des endroits solitaires. Ils coupaient de grandes tiges d’églantiers ou de lilas en projetant des décorations nouvelles. Ils causaient des causeries douces, et quand ils étaient fatigués, ils s’asseyaient. Et, devant ce grand réveil de la nature, au milieu de cette poussée de vie du printemps, le réveil de l’âme se faisait chez Jacques. Il avait pour son ami d’interminables questions et celui-ci y répondait d’une voix douce. Au reste, renfermé pour ses camarades, dont les allures turbulentes l’effarouchaient, il n’avait d’expansion qu’envers son grand aîné.

Le sentiment de l’abbé Gratien fut toute élévation.

Jacques l’avait choisi pour confesseur ; et, quand il venait s’agenouiller devant lui, les samedis soirs, il se sentait plus à l’aise que devant un autre Père. Sa confession était une causerie et ses causeries une confession. L’abbé avait sous les yeux une jeune âme nue et il en suivait avec amour la vive évolution. Un jour vint où cessèrent les aveux banaux d’avoir été distrait aux offices ; Jacques accusa certains troubles vagues de sa conscience et de ses sens ; l’abbé lui de-