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SODOME.

et se fit jour dans ce cœur inculte. Elle alla le voir souvent et une douce intimité s’établit entre ces deux êtres primitifs, si voisins de sentiments, l’enfant commençant à peine à sentir, et la mère restée enfant.

Jacques était vraiment bien heureux à Juilly. Les bons Pères n’étaient ni sévères, ni exigeants, et, avec la tranquillité de sa nature caressante jointe à une certaine réserve acquise, il fut aimé.

L’hiver se passa monotone, avec des récréations dans la neige. Dans le contact des autres, son esprit commençait à se développer et, dès l’abord, cela allait bien avec sa nature peu parlante, il aima à observer les choses.

Les exercices religieux tenaient une grande place dans l’éducation des Pères ; il les pratiqua tout de suite machinalement, n’ayant pas une mère dévote ; puis bientôt son tempérament nerveux y trouva des douceurs indéfinissables, presque sensuelles, et il devint pieux.

Cela commença un soir, à un office de la semaine sainte. Dans la plus vieille chapelle du collège tous les petits étaient réunis et chantaient, en une langue encore incomprise, les lamentations de Jérémie. Il était assis, à sa place, son eucologe à la main, mais l’esprit bien loin, dans des rêves mal débrouillés d’enfant. Une