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LA CHUTE.

puits ; le moment suprême était venu. La cage venait de remonter et les attendait. Une grande boîte en fer, un wagonnet, qui tout à l’heure était rempli de charbon, était la nacelle très peu confortable de cette ascension à rebours. Sur les conseils de l’ingénieur, Soran entra le premier et s’accroupit ; Laus se serra auprès de lui. Sur un châssis, au-dessus de leur tête, le guide prit place, le signal fut donné et ils enfoncèrent lentement dans le trou noir. Ce fut un instant pénible. Le puits, de la même largeur que le wagonnet, semblait infini et ses parois laissaient suinter de l’eau qui les transperçait peu à peu. Ils gardaient le silence d’instants en instants, absolument inconscients, puis livrés à des pensées très graves. Dans les trois minutes que dura la descente, Laus eut le temps de penser à sa maîtresse, puis à rien, ensuite que cette eau qui vous mouillait était bien désagréable, mais que la fille du vieux Borain était assez jolie ; puis, il compta jusqu’à soixante, regarda la lampe qu’il avait posée dans le fond du wagonnet et il pensa au grisou, puis au gaz d’éclairage et aux ouvrages de Pic de la Mirandole. Soran, dans une sombre unité des réflexions, essayait à travers l’obscurité de voir le visage d’Henri, tout en songeant que si la corde cassait il serait damné. La contrition en