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LA CHUTE.

tenant qu’elles pussent encore surgir devant lui.

Très joyeux, il monta chez Laus et le vit dormant. Il s’assit à son chevet et le contempla longuement : un amour paternel envahit son cœur ; certes, en cet instant, il recouvra sa sérénité d’autrefois ; il ne vit plus en Laus que cette âme, cet ange blanc qu’il lui était permis d’aimer et de trouver beau, au-dessus de la nature. Il pensa que Dieu l’avait faite plus belle, cette âme dans un corps plus beau, et, se penchant sur le lit, ce fut l’âme d’Henri Laus qu’il embrassa en le baisant au front. Henri s’éveilla à demi et, prenant la tête de Jacques dans ses bras, sous le frôlement de ses doux cheveux, il appuya, non sur son front, mais sur sa bouche un long et humide baiser. Longtemps ses mains caressèrent les épaules de Jacques, cependant que celui-ci, troublé dans son corps, n’osait se dégager de cette étreinte. Enfin, les bras de Laus retombèrent inertes. Il dormit encore quelques instants, puis se réveilla triste, comme sortant d’un rêve délicieux pour rentrer dans la sombre réalité… Il regarda Soran avec des yeux étonnés et, vaguement, il sembla soupçonner sa méprise. Jacques, l’attendant, alla dans le salon voisin et il s’assit à l’orgue. Quelques instants après Henri venait le rejoindre. Il eut une idée amusante : il