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LE MONDE.

d’un mot ce prêtre : c’était un homme. On se rappelle, sans doute, sa sollicitude pour Jacques enfant, ses imprudences de directeur de conscience inexpérimenté ; il comprenait aujourd’hui qu’il pouvait réparer le mal qu’il avait peut-être causé dans un excès de zèle, et il pensa que la Providence venait sans doute de le conduire sur le chemin de Soran comme un guide et comme un sauveur ; un prêtre, en effet, dans sa vie constante et intime avec des consciences si diverses, un confesseur, n’acquiert-il pas une divination qui lui permet, sur un regard, sur un simple mot, de lire dans un esprit avec une merveilleuse lucidité ? Sans nul doute, Soran traversait une crise terrible, et son devoir, à lui prêtre, était de ramener au bien celui qui s’en était peut-être écarté. Telles furent les premières réflexions de l’abbé Gratien. Depuis dix ans, sa science de confesseur, son art même, si l’on veut, car la direction des consciences ne demande-t-elle pas des qualités naturelles que suppléerait mal l’étude, s’était bien augmentée. Après avoir analysé pendant plusieurs années des natures simples d’enfants, il avait eu entre les mains, on peut s’exprimer ainsi en parlant d’un chirurgien des âmes, des consciences plus complexes d’hommes. En sortant du séminaire,