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SODOME.

marche est résignée, sans ambition. Le hasard l’a conduit dans ce milieu de Paris si glissant, mais inoffensif pour un homme peu sensible aux choses extérieures. Il vit naïvement, sans intrigues ; il dit sa messe et lit son bréviaire avec une longue accoutumance qui fait de ces deux devoirs des fonctions organiques de sa simple existence. N’y a-t-il pas aussi quelque paresse dans ce détachement du monde ? D’une origine infime le plus souvent, il est heureux de sa condition présente et n’a pas de désirs. N’est-ce pas la parfaite félicité pour un homme destiné à pousser la charrue ou à être, tout au plus, instituteur ?

Cette classification, comme toutes les classifications, est peut-être absolue ; néanmoins elle fera mieux comprendre le caractère de l’abbé Gratien. Celui-ci, avant tout, était un prêtre très sincère et très humain : sincère, puisqu’il avait de son ministère l’idée la plus haute, et un sentiment très net de ses devoirs ; humain, puisqu’il avait dû lutter contre des tentations et qu’il y avait succombé quelquefois. L’esprit trop haut pour se laisser séduire par des intrigues mesquines, trop perspicace pour ne pas mépriser le monde, il n’était pas encore, cependant, le prêtre humble et timide ; ne peut-on résumer