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LA RETRAITE.

obstacles que les courageux auraient attaqués plus franchement et avec moins de succès ; est-ce une grâce particulière récompense de leur modestie ? C’est ce qu’aurait sans doute pensé Soran s’il avait réfléchi à son action en ce moment ; mais n’est-ce pas plutôt, tout simplement, la détente brusque d’un ressort longtemps comprimé, le déploiement soudain et énergique de forces longtemps emprisonnées ?

Il s’avança (plus tard il s’expliqua très mal son courage, l’attribuant à une sorte d’inconscience) et, debout, derrière elle, le regard fixé sur sa nuque, il eut une intensité de volonté irréfléchie, même si cela semble bizarre, c’est-à-dire qu’il ne songea pas à ce que son attitude pouvait avoir d’inconvenant envers une inconnue.

Brusquement (combien à ce moment il pensa aux bramines !), elle se retourna et le regarda…

Quoi alors ?

Est-ce la vulgaire entrée en connaissance d’un homme et d’une femme, comme tous les jours à Paris, ou ailleurs, ou autre part, dans la rue ou dans un salon, après une présentation ou un hasard, après un hasard en somme, toujours ridicule ou au moins embarrassante, avec des mensonges et des habiletés ?

Il n’y eut rien de tout cela.