Page:Argens - Thérèse philosophe (Enfer-402), 1748.djvu/69

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
47
Philosophe.

ſoit occupé que du ſalut des ames & de la gloire de Dieu. Il avoit beaucoup de talens pour la chaire, ſes exhortations, ſes diſcours étoient pleins de douceur, d’onction. Il avoit l’art de perſuader. Né avec beaucoup d’eſprit, il l’employoit tout entier à acquérir la réputation de convertiſſeur ; & en effet un nombre conſidérable de femmes & de filles du monde ont embraſſé le parti de la pénitence ſous ſa direction.

On voit que la reſſemblance des caracteres & des vûes de ce Pere & de Mademoiſelle Eradice ſuffiſoit pour les unir. Auſſi dès que le premier parut à Volnot où ſa réputation étoit déja parvenue avant lui, Eradice ſe jetta, pour ainſi dire dans ſes bras. A peine ſe connurent-ils qu’ils ſe regarderent mutuellement comme des ſujets propres à augmenter leur gloire réciproque. Eradice étoit certainement d’abord dans la bonne foi ; mais Dirrag ſçavoit à quoi s’en tenir : l’aimable figure de ſa nouvelle Pénitente l’avoit ſéduit ; & il entrevit qu’il ſéduiroit à ſon tour & tromperoit fa-