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Philosophe.

mon parti ! Le lendemain vous parûtes ; je me précipitai dans vos bras. Oui, Monſieur, je ſuis à vous, m’écriai-je, ménagez la tendreſſe d’une fille qui vous cherit : vos ſentimens m’aſſurent que vous ne contraindrez jamais les miens. Vous ſçavez mes craintes, mes foibleſſes, mes habitudes. Laiſſez agir le temps & vos conſeils. Vous connoiſſez le cœur humain, le pouvoir des ſenſations ſur la volonté. Servez-vous de vos avantages, pour faire naître en moi celles que vous croirez les plus propres pour me déterminer à contribuer ſans réſerve à vos plaiſirs. En attendant je ſuis votre amie &c…

Je me rappelle que vous m’interrompîtes à ce doux épanchement de mon cœur. Vous me promîtes que vous ne contraindriez jamais mon goût & mes inclinations. Tout fut arrangé. J’annonçai le lendemain mon bonheur à la Bois-Laurier, qui fondit en larmes en me quittant ; & nous partîmes enfin pour votre Terre, le jour que vous aviez fixé.