Page:Argens - Thérèse philosophe (Enfer-402), 1748.djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
100
Thérèse

fidie que je venois de lui faire & de diverſes réflexions dont j’étois agitée. L’Abbé T… me regardoit attentivement ; je me crus perdue ; mais bientôt je l’entendis qu’il diſoit à demi bas à Madame C… voyez ſi Théreſe n’eſt pas jolie ? Elle a des couleurs charmantes ; ſes yeux ſont perçans & ſa phyſionomie devient tous les jours plus ſpirituelle. Je ne ſçai ce que Madame C… lui répondit ; ils ſoûrioient l’un & l’autre. Je fis ſemblant de n’avoir rien entendu, & j’eus grand ſoin de ne pas les quitter de toute la journée.

En rentrant le ſoir dans ma chambre, je formai mon plan pour le lendemain matin. La crainte où j’étois de ne pas m’éveiller d’aſſez bonne heure, fut cauſe que je ne dormis point. Vers les cinq heures du matin je vis Madame C… gagner le boſquet où Monſieur T… l’attendoit déja ; ſuivant ce que j’avois oui la veille, elle devoit bientôt rentrer dans ſa chambre à coucher où étoit le lit de repos dont elle avoit parlé. Je n’héſitai pas de m’y couler & de