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enhardi de donner le conseil à ce noir extraordinaire, d’aller finir en France ses jours dans le repos ; — C’est bien mon projet, reprit-il ; je l’exécuterai quand ça pourra faire un vaisseau pour me porter ; — et il montra le plus petit arbuste du lieu où ils étaient. »

Si ces deux reparties de T. Louverture prouvent, et sa dignité et le grand sens de son esprit, les paroles qui les attirèrent prouvent aussi que les officiers français qui les lui adressèrent, contribuaient merveilleusement à obtenir le résultat qu’on désirait. Quand Hédouville faisait sentir au général en chef de Saint-Domingue la différence qu’il établissait entre lui et son émule subordonné, lui faire insinuer encore qu’on n’avait plus besoin de ses services dans la colonie, c’était en quelque sorte l’insulter, c’était vouloir exciter en lui le sentiment de la jalousie contre Rigaud. Ainsi, loin qu’en se présentant tous deux devant Hédouville, celui-ci « dut reconnaître combien leur déffiance commune et individuelle rendait sa mission difficile, » — c’étaient, au contraire, cet agent lui-même et ses officiers qui faisaient naître cette défiance ou qui l’excitaient, et qui augmentaient la défiance réelle du général en chef contre l’agent.

Quoi qu’il en ait été, T. Louverture et Rigaud quittèrent le Cap ensemble ; ils allèrent sur l’habitation Descahos, propriété du général en chef ; ils passèrent ensuite à Saint-Marc, et se rendirent au Port-au-Prince.

Une lettre de Boerner à Hédouville, du 27 juillet, lui dit que ces deux généraux arrivèrent à Saint-Marc la veille, et qu’ils repartirent dans la nuit du 26 au 27. « Je suis malade, dit Boerner, Rigaud est venu me voir. Il est satisfait de l’accueil que vous lui avez fait. »

Le 2 août, en partant du Port-au-Prince pour se rendre